Dénouement

« Ce n’est pas moi qui vais te jeter la première pierre. Il faut y aller si cela te permet de devenir encore plus vrai, encore plus authentique. »

Pascal sent un nœud se dénouer dans son ventre. Il est assis face à son beau-père dans son bureau tapissé de livres et d’anciennes gravures, et entend en contrebas le trafic urbain de la mi-journée. Il décrit les scènes emblématiques du décès de son père pour illustrer ce qu’elles disent de sa place dans son clan. Une place qu’il dépeint sans complaisance ni rancune. Dans son récit, il réalise une fois de plus la logique implacable qui l’a mené au pastorat pour exercer sa fonction parmi les siens. Il se voit comme protagoniste d’une dramaturgie familiale traversant les générations. Un jeu de faux-semblants avec des rôles prédéterminés. Des masques dont les acteurs sont tantôt captifs, tantôt complices. Il est temps pour lui de faire tomber le sien et de quitter la scène.

Pascal vient demander la libération à son ancien maître de stage. Au chevet de son père sur son lit de mort, il a compris que sa sortie de l’Eglise était inéluctable. Qu’elle était l’acte ultime qui lui permettrait de s’émanciper une fois pour toutes des attentes familiales. Comme l’observe son beau-père, ces attentes l’ont littéralement nourri au sein maternel.

L’accueil inconditionnel et la bénédiction de son maître de stage pastoral touchent Pascal au plus profond de son être. Jamais de sa vie une figure parentale ne l’avait encouragé et autorisé de la sorte à être et devenir lui-même. Dans les bras de son mentor, Pascal trouve la guérison d’une blessure aussi vieille que profonde.

Même son de cloche quelques jours plus tard auprès de son pasteur de paroisse à qui Pascal motive son départ de l’Eglise. A l’écoute du récit de Pascal, le ministre y décèle quelque chose d’invasif dans la lignée de ce dernier, transgressant une limite pour le pousser là où il n’aurait pas forcément choisi d’aller. Pascal a toujours gardé ses distances avec la paroisse de son lieu de vie. Selon les mots du pasteur, cette décision permet de lever, enfin, une ambiguïté qu’il observait depuis longtemps chez lui.

Lorsqu’il signe sa lettre de démission, Pascal est en paix. Il coupe une attache qu’il n’avait pas entièrement choisie. La distance qu’il prend lui permet de suivre sa propre voie et de poser ainsi un regard apaisé sur l’institution qu’il quitte. Il peut la regarder avec bienveillance maintenant qu’il n’y est plus lié. Les tensions qu’il a ressenties pendant toutes ses années de service n’ont plus lieu d’être.

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