Avec le solstice d’hiver, les jours recommencent à s’allonger. Le printemps est encore loin, la saison sombre bat son plein. Pourtant, avec le retour du soleil, le renouveau est sur le point de se réveiller.
Pour me plonger dans cette promesse, je vais enfin visiter les menhirs de Corcelles-près-Concise. Je connais bien la région pour y avoir vécu, mais je ne m’y étais jamais arrêté.
Je rencontre les quatre pierres dressées par une belle fin d’après-midi ensoleillée. Leurs ombres sont étirées par la lumière qui baigne l’horizon.
Au toucher, c’est la pierre de l’est qui se distingue par sa chaleur. En préparant ma visite, j’ai appris qu’une cupule est creusée sur son sommet. Cette cavité reste invisible pour la plupart de visiteurs : il faut grimper sur le rocher pour la voir ou la chercher à tâtons en levant les bras. C’est ce que je fais. Un faisceau d’énergie émane du sommet du menhir. Il est très condensé et donne presque le sentiment d’une brûlure quand la main le traverse. En suivant sa source, je mets le doigt sur la cupule.
Les quatre menhirs faisaient probablement partie d’un cercle de pierres dont la majorité des éléments a disparu. En faisant le tour de ceux qui restent, je sens à certains endroits que l’air est plus dense. Toujours du côté est, j’ai le flash d’un transept. Le cercle est relié à l’église de Concise. Mon impression furtive est confirmée par ma visite du temple sur le chemin du retour. Il m’est cependant plus difficile de lire le lieu de culte. Son atmosphère a la même qualité que celle du cercle, mais le culte chrétien qui est célébré depuis des siècles lui donne une coloration plus opaque pour moi.
En poursuivant ma ronde, j’ai l’impression de me mêler à une foule invisible dans la partie sud du cercle. Les visages sont tournés vers le nord, en direction de la montagne. Par comparaison, la partie opposée du cercle semble vide.
La visite des sites sacrés stimule-t-elle l’ouverture de mes sens ou mon autosuggestion ? Pour moi, la réponse est évidente. L’histoire de ces lieux est encore présente et elle nous traverse. Ce que je perçois aujourd’hui n’est pas le fruit de mon imagination, mais le fruit de mes sensations. J’apprends à appréhender les sites d’abord avec mon corps en fermant les yeux. Quelle est ma perception de l’espace ? Est-ce qu’il y a du mouvement ? Est-ce que je suis seul ? C’est par toutes les pores de ma peau que je capte l’information qui m’est accessible. Les images, si elles me viennent, arrivent seulement dans un deuxième temps. La précédence du corps sur le mental est pour moi une clé pour lever un bout du voile sur l’autre monde.
D’autres récits sur le druidisme se trouvent dans mon livre « Le passage du gué, de Calvin à Merlin »: https://shop.isca-livres.ch/isca-livres/1176-book-le-passage-du-gue.html

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